Cedric Bruel

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RENCONTRES VIGNERONNES

Cedric Bruel

Interiew de Cedric Bruel du Celliers d’Orfée                                                                     

Cedric Bruel, directeur de la cave coopérative Les Celliers d’Orfée, est un véritable « geek » du vin. Ses marottes ? La recherche et développement, et surtout les sols vivants ! Il nous fait partager sa vision de l’avenir de sa cave et des vins de Corbières en général.

Pouvez-vous nous présenter Les Celliers d’Orfée ?

Les Celliers d’Orfée datent de 2006. La cave est le fruit de la fusion des caves coopératives d’Ornaisons, Ferrals et Luc sur Orbieu, créées au début des années 1930. Son territoire, qui couvre 970 hectares, s’étend du littoral (Portel des Corbières, Bages, etc.) jusqu’à Villerouge la Crémade, voire Talairan. Quant à la production, elle avoisine les 50 000 hectolitres ! Nous dénombrons 140 adhérents aux profils disparates : certains possèdent 60 hectares alors que d’autres ont quelques vignes de vieux Carignan au bout du jardin, plantées par le grand-père, ramassées à la main et qu’on me rapporte dans des comportes…

 

Depuis quand êtes-vous directeur de la cave ?

Je suis arrivé en mars 2018. Je succède à Christophe Groppi, qui a fait d’importants investissements dans la cave. Chai à barrique, salle de dégustation, espace de stockage… Les bâtiments de 1930 ont été rénovés à hauteur d’1,2 millions d’euros.

 

Que faisiez-vous avant de rejoindre Les Celliers d’Orfée ?

J’ai été maitre de chai à Fabrezan, juste à côté, pendant 9 ans. A la base, je suis ingénieur en agroalimentaire. J’étais destiné à faire des pâtes et de la bouffe pour chiens (rires). Mais j’ai craqué dès que j’ai fait mes stages… et choisi d’effectuer mon stage de dernière année d’études dans les Corbières, dans le vin. Cependant avant mon job à Fabrezan, j’ai pas mal bourlingué dans le milieu du vin…

 

Quelles ont été les étapes les plus marquantes de votre parcours ?

Mon premier boulot était celui d’ouvrier agricole dans un domaine des Corbières, au Grand Sabo. Puis j’ai été contacté par une entreprise qui a inventé des techniques de vinification, Oenodev, implantée dans le Gers. Pendant 3 ans, j’y ai fait de la recherche & développement sur l’oxygène et les mouts de raisins blancs. Je travaillais sur une technique inventée à la fin des années 70 par un Allemand, Müller-Späth, qui avait remarqué qu’en Bourgogne, quand on pressait les raisins blancs et qu’on les laissait passer sur la maie (partie qui reçoit le jus à la sortie du pressoir), ils s’oxydaient avant la vinification, et qu’une fois devenus vin, ils étaient quasiment inoxydables. J’étais entouré de thésards, d’ingénieurs et d’œnologues qui venaient de partout dans le monde. J’ai travaillé au Portugal, en Espagne, au Chili, en Argentine…

 

Pourquoi avoir quitté ce job ?

J’ai rencontré ma femme en Argentine ! Et comme mon employeur ne voulait pas m’envoyer là-bas, j’y suis reparti par mes propres moyens. J’ai travaillé dans une toute petite une cave là-bas (5000 hectolitres), vers Mendoza. Je m’occupais du suivi parcellaire et de la vinification... Et je faisais des allers/retours entre Mendoza et une grosse cave coopérative de l’Hérault, à Nissan lez Ensérune (120 000 hectolitres). Cela m’a permis d’appréhender les deux côtés du métier de vigneron : le côté industriel et le coté dentelle/haut de gamme. Chaque année, je passais 6 mois en Argentine et 6 mois en France. Du coup, j’ai fait 13 vinifications en 6 ans et demi !

 

Qu’est-ce qui vous a poussé à revenir dans les Corbières ?

J’étais fatigué de faire 2 vinifications par an. Je travaillais 7 jour sur 7, 15h par jour. Alors j’ai trouvé ce job de maitre de chai à Fabrezan, et essayé d’apporter à la cave mon bagage en R&D. On a travaillé sur l’ADN du vin, le sans sulfite, le cracking des rosés*, etc.

 

Revenons aux Celliers d’Orfée… Quelles sont les nouvelles orientations de la cave depuis votre arrivée en mars 2018 ?

Nous avons augmenté les volumes de rosé. Alors que nous faisions 3000 hectolitres par an, nous en faisons aujourd’hui 10 000, ce qui représente 20% de la production totale de la cave. Pour le moment, ça nous a bien réussi !

 

 

Comment décidez-vous de l’affectation des parcelles aux différentes cuvées ?

Les vignerons de la cave coopérative vont dans les vignes d’AOP pour les noter, selon un principe d’autoévaluation. Une trentaine de vignerons participent, et vont contrôler la qualité des vignes dans une zone hors de la leur. Les vignes sont alors notées A, B ou C selon un barème précis.

 

Sur le plan du développement durable, quelles sont les initiatives des Celliers d’Orfée ?

Nous avons lancé la démarche HVE cette année. C’est le début d’un travail qui va nous demander beaucoup d’efforts. Mais mon objectif est d’aller beaucoup plus loin… J’ai la chance de travailler avec des adhérents hyper motivés. Nombre d’entre eux ont déjà beaucoup d’avance. D’autre part, en 3 ans, 80% des surfaces ont été traitées en confusion sexuelle pour éviter le ver de grappe.

 

Le bio est-il un objectif pour vous ?

Je voudrais aller au-delà du bio ! Je suis pour le bio, bien sûr. Mais on constate que certaines années, comme l’an dernier avec le mildiou, l’utilisation du cuivre pose problème. Je ne peux pas dire à mes viticulteurs de foncer vers le bio, car les mauvaises années on ramasse peu de raisin.

 

Qu’entendez-vous par aller « au-delà du bio » ?

Avant, on mettait des centaines de tonnes de marc avant la plantation… Or aujourd’hui, on avoisine les 500kg par hectare d’engrais organique, ce qui n’est pas suffisant. Il faut davantage de matière organique, des champignons dans le sol, des sols sans résidus phytosanitaires et en bonne santé. Prenez l’exemple de l’Argentine. Là-bas, j’ai vu des sols qui n’avaient jamais été cultivés. On y jette une graine et 3 ans après, il y a un arbre ! Faire en sorte de traiter moins ou mieux, oui ! Mais le bio n’est pas la seule réponse possible...

 

Je veux des sols vivants ! Moins il y a de vie dans le sol, moins la vigne est armée pour lutter contre les pathogènes.

Entrevoyez-vous d’autres possibilités pour réduire encore les traitements sur la vigne ?

Pourquoi pas des cépages résistants à l’oïdium et au mildiou ? Une fois ces deux maladies éradiquées, il ne resterait comme menace que la flavescence dorée. Et là, on n’a pas le choix : même en bio, on doit traiter la vigne. C’est une obligation préfectorale.

 

Quelle est la cuvée phare des Celliers d’Orfée ?

Il s’agit de la cuvée Sextant, notre haut de gamme rouge, qui a obtenu une médaille d’or au Concours Corbières 2018. Il contient majoritairement de la Syrah et procède d’une macération carbonique. Tout est ramassé à la main, et il est élevé en fut de chêne. Depuis 30 ans, on a des consommateurs qui sont fanatiques du Sextant… On n’a même pas le droit de toucher l’étiquette, sinon ils sont malheureux ! Nous faisons tout pour que la qualité de la Syrah soit exceptionnelle. Et nous avons de la chance : un terroir magnifique et des gens motivés. Petites exploitations comme plus grandes surfaces, tous y participent…

 

Le p’tit mot de la fin ?

Je suis content de Catharsis, notre nouvelle cuvée de rosé en AOC Corbières. Chose rare : elle contient 80% de Carignan ! Avis aux curieux et amateurs de rosés 

 

* cracking des rosés : méthode de fabrication de rosés basée sur le modèle des thermovinifications en rouge : dans le cas des rouges on chauffe les raisins pour obtenir la couleur, on presse tout de suite le raisin encore chaud et on vinifie en phase liquide pour les rosés on macère à chaud le moût après le pressurage ou la saignée.